Succession familiale
Durabilité rime avec résultats financiers
La durabilité est importante pour 80% des entreprises. «Ce chiffre surprend.»: Daniel Kalt, économiste en chef, dans une interview.
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Succession familiale
La durabilité est importante pour 80% des entreprises. «Ce chiffre surprend.»: Daniel Kalt, économiste en chef, dans une interview.
Nous ne pouvons pas vivre aux dépens des futures générations.
La durabilité, en particulier dans une optique écologique, est un thème clé dans les pays développés depuis des années. Les grèves pour le climat de la jeune génération ainsi que les succès des partis verts l’ont à nouveau mis en exergue. La thématique nous préoccupe cependant depuis bien plus longtemps. En tant que prestataires financiers, les banques assument en effet un rôle charnière qui leur permet d’influer sur les développements dans le monde.
En tant qu’intermédiaire financier, nous avons l’opportunité de déterminer les activités à financer. Il ne tient donc qu’à nous de les guider dans une direction durable.
Les sociétés réaliseront que c’est uniquement en s’orientant sur la durabilité qu’elles bénéficieront de moyens financiers avantageux.
Par l’octroi de crédits, nous pouvons privilégier certains secteurs et faire l’impasse sur d’autres. Récemment, nous avons décidé de ne plus financer de nouvelles centrales au charbon. Ou nous accordons des avantages financiers aux entreprises suisses qui optent pour l’assainissement énergétique de leur bâtiment. Nous pouvons encore renforcer cet effet en encourageant les investissements durables dans le domaine de la gestion de fortune.
En tant que principal gestionnaire de fortune du pays, nous sommes en mesure d’intensifier encore la tendance. Aujourd’hui déjà , 10% de nos clients investissent selon des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Un chiffre que nous souhaitons accroître considérablement ces prochaines années. Il suffirait que la moitié de nos clients n’investissent plus que dans des entreprises durables pour générer un considérable effet d’imitation. Les sociétés réaliseront que c’est uniquement en orientant progressivement leurs activités sur la durabilité qu’elles bénéficieront de bonnes évaluations et, par conséquent, de moyens financiers avantageux. Cette prise de conscience a bien plus d’impact que les consignes et les interdictions étatiques.
On l’a compris : Durabilité = Résultats financiers.
Il y a quelques années encore, les portefeuilles étaient considérés comme durables dès qu’ils excluaient un certain nombre de branches. Les solutions de placements durables actuelles vont beaucoup plus loin. Nous ne considérons que les entreprises qui répondent aux standards ESG les plus stricts. Nous recourons en outre aux prêts de la Banque mondiale visant à financer des projets d’infrastructure durables, ou nous investissons dans des projets d’impact investing spécifiques qui, outre le rendement financier, doivent aussi faire état de résultats écologiques ou sociaux mesurables.
Quelque 80% des entreprises sondées dans notre recensement ont indiqué que la durabilité était importante, voire très importante à leurs yeux. Ce chiffre est d’autant plus surprenant que de nombreuses micro-entreprises, disposant elles-mêmes d’une influence restreinte, ont participé à l’étude. À titre d’exemple: l’influence d’une enseigne de coiffure sur la durabilité est nettement inférieure à celle de la société immobilière qui lui loue les locaux. Pour les grandes entreprises, l’image joue par ailleurs un rôle plus important quand il s’agit de recruter des spécialistes ou gagner des clients. Les sociétés d’une certaine taille cherchent également à éviter les risques de réputation pouvant entraîner des conséquences juridiques et financières. Les entreprises plus petites sont moins sollicitées à cet égard.
L’aspect lucratif à long terme de la durabilité est en train de s’ancrer lentement dans les mœurs. Une grande partie des sociétés suisses commencent à reconnaître que la durabilité écologique peut aller de pair avec les résultats financiers. L’utilisation parcimonieuse des ressources, la réduction du rebut ou le recyclage des déchets permettent également d’économiser des coûts lors de la production.
Il n’y a pas eu de grandes surprises. En rapport avec les objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU, les entreprises suisses se focalisent sur la consommation responsable, la production durable et la protection du climat, puisque les objectifs de développement fondamentaux ont déjà été atteints dans notre pays. La pauvreté est quasi inexistante, nous disposons d’eau potable en suffisance et vivons en paix. Les résultats seraient vraisemblablement différents dans d’autres régions.
La durabilité doit être véhiculée par le management.
De manière générale, la durabilité écologique joue un rôle moindre dans le tertiaire, puisqu’il s’agit d’un secteur dont les activités sollicitent bien moins de ressources que celles des sites de production. Ici, j’estime que le potentiel réside notamment dans la consommation d’énergie.
L’écologie est du ressort du patron, pourrait-on dire. Cela offre certes des avantages, mais dépend fortement de la taille d’une entreprise. Ainsi, 60% des entreprises sondées emploient jusqu’à dix collaborateurs. Dans ce cas de figure, il est judicieux de confier l’écologie au patron. Dans les grandes sociétés, par contre, le sujet est le fait d’une entité créée à cet effet.
Cela s’avère très compliqué. Et je n’ai pas connaissance d’études. Il s’avère toutefois que les entreprises agissant de manière durable présentent des performances équivalentes aux autres sociétés, si ce n’est meilleures.
Le fait qu’une entreprise soit guidée avec succès sur le chemin du futur à l’issue d’une succession dépend de la planification minutieuse et précoce de ce processus. Bien entendu, chaque patron aspire à ce que l’œuvre de sa vie soit perpétuée avec succès et que les valeurs et les visions de la génération actuelle restent ancrées dans la culture d’entreprise. L’expérience a toutefois démontré qu’il est primordial de dissoudre les dépendances trop soutenues face aux personnalités dirigeantes cédantes, de sorte à offrir la marge de manœuvre nécessaire à la nouvelle direction.
Je pense que les principes et une culture d’entreprise prononcée peuvent en premier lieu être conservés dans l’entreprise grâce au choix minutieux du successeur. Car même couchés sur papier, certains points ne pourront être concrétisés que de façon limitée, en particulier si la nouvelle direction dispose de valeurs diamétralement opposées. Les thèmes comme la durabilité doivent être véhiculés par le management et mis en œuvre quotidiennement.